Plan du site / nous contacter |
Retour à la page précédente
Accueil / Les cousins d'Edouard / Histoire des Radigois / Radigois l'Irlandois / Chapitre LXXVI
 
 
 
1358 : Radigois de Dury (Derry ?),
capitaine de la guerre de Cent Ans
 
Comment les Navarrois ardîrent (brûlèrent) l'abbaye d'Ourquans (Orcamp) ;
et comment ils s'espandirent en plusieurs lieux sur la rivière d'Oise et d'Esne (Aisne) ;
et comment ils prirent la forte ville de Vely.
 
Cette déconfiture enorgueillit et amonta (éleva)si les Navarrois et leurs routes (troupes) qu'ils chevauchèrent par tout le pays à leur volonté et emmenèrent la plus grand' partie de leurs prisonniers à Creil, pourtant (attendu) qu'il y a bonne ville et forte et bien séant. Et conquirent là très grand avoir, tant en joyaux comme en prisonniers que ils rançonnèrent depuis bien et fort ; et en devinrent les compagnons si riches et si jolis (joyeux) que merveilles ; et rançonnèrent ces bourgeois de Tournay et d'autres villes à selles étoffées bien friquement (fraîchement), à fers de glaive, à haches et à épées, à jacques ou à grippons (bottines), ou à houseaux (pourpoint) et à toutes manières d'outils qui leur afféroient (convenaient).

Les chevaliers et les écuyers rançonnoient assez courtoisement, à mise d'argent, ou à coursiers, ou à roncins (cheval de charge) ; ou d'un povre gentilhomme qui n'avoit de quoi rien payer, ils prenoient bien le service un quartier d'an, ou deux, ou trois, ainsi qu'ils étoient d'accord. De vins, de vivres et de toutes autres pourvéances (provisions) avoient ils bien et largement ; car le plat pays leur en délivroit assez, pour cause de rédemption ; rien n'alloient dedans les bonnes villes, fors (peut-être) en larcin (en cachette) ou par bon sauf-conduit qu'ils vendoient bien chèrement ; cela tenoient ils entièrement, exceptés trois choses, chapeaux de bièvres, plumes d'ostruce (autruche), et fers de glaive : oncques (jamais) ils ne voulurent mettre ni accorder ces trois choses en leurs sauf-conduits.

Si firent ceux de Mauconseil, depuis cette besogne avenue, assez plus de maux que devant, et ardirent (brûlèrent) la plus grand' partie de l'abbaye d'Orquans, dont ce fut grand dommage, et moult en déplut grandement aux capitaines de Mauconseil quand ils le sçurent.
 

 

Si se épandirent ces Navarrois en plusieurs lieux d'une part et d'autre la rivière Oise et d'Esne [Aisne], et vinrent deux hommes d'armes apperts (experts) durement, Radigois de Dury et Robin l'Escot(1), prendre par eschellement (assaut) la bonne ville de Velly, dont ils firent une bonne garnison, et la réparèrent et fortifièrent durement. Ces deux compagnons avoient dessous eux à leurs gages bien quatre cents compagnons et retenoient toutes manières d'autres gens, Allemands, Hainuyers, Flamands, Brabançons et autres étrangers, et leurs donnaient certaines souldées (soldes), et payoient de mois en mois. Si courroient ceux de Vely, ceux de Mauconseil, ceux de Creel et ceux de La Harelle partout où ils vouloient, ni nul ne leurs contredisoit, car les chevaliers et les écuyers étoient tout embesognés (occupés) de garder leurs forteresses et leurs maisons. Et alloient ces Navarrois et ces Anglois chevauchoient ainsi qu'ils vouloient une fois armés et l'autre désarmés ; et s'ébattoient de fort en fort, tout ainsi comme si le pays fut en paix.


Passez la souris sur l'image
 
Le jeune sire de Coucy faisoit bien garder les châteaux et soigneusement ; et étoient ainsi que souverain et gouverneur de toute la terre de Coucy un appert (expert) chevalier durement (grand) et vaillant homme qui s'appeloit le chanoine de Robersat. Cestui (celui-là) ressoignoient (craignaient) les Anglois et les Navarrois que nuls des autres ; car il en rua (jeta) plusieurs fois maints jus (à bas) ; et aussi fit le sire de Roye.
 
 
1 - Note de J. Buchon : nous avons dit que Radigois de Derry était Irlandais; celui que Froissart nomme Robin l'Escot était probablement Écossais.
 
« Les croniques que first Jehan Froissart en.VIII.livres », manuscrit.
Source : Bibliothèque nationale de France, Département des manuscrits, Français 2641. Date de mise en ligne dans Gallica :18/09/2012. Télé accessible à : http://gallica.bnf.fr
 
©Jean-Yves Radigois, Marie-Brigitte Radigois – Les cousins d’Édouard – 2012